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En hiver le doux temps n est que d une journée.
L otage passa vite et le ciel devint clair;
La course du ruisseau fut encore enchaînée
Et nul vol ne brava la froidure de l air.
Alors l un des arbustes, 
Celui qui n avait pas, en parlant avec fiel,
Secoué l eau du ciel,
Et dit des paroles injustes 
L un des arbustes vit, sur ses rameaux charmants,
Des flots de diamants,
Des guirlandes étranges,
Des perles et des franges;
Mais l autre s inclina de honte et de regret,
Car sur ses branches dénudées
Il n avait pas voulu, prenant un ton aigret,
Supporter les ondées.
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Anthologie de la fable au Québec
Les peines, les chagrins qui remplissent nos jours
Par la soumission se transforment en joies;
Ils épurent notre âme et sont les grandes voies
Qui mènent de la haine aux célestes amours.
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Anthologie de la fable au Québec
Les deux livres
Deux livres reposaient sur la même tablette :
Un ancien, un nouveau.
L un étalait aux yeux une riche toilette
Faite de marcquin et non de simple veau,
Était doré sur tranche
Et portait marge blanche
Large comme deux doigts;
L autre n avait, je crois,
Que demi-reliure,
Et plus d une éraillure,
En guise de rayons, marquetait le couvert.
Il avait fort souffert
Ou de l indifférence ou bien de la malice.
Quand je dis « reposaient » je ne rends pas justice
Au plus brillant des deux, en vérité;
Car il était souvent, par quelque main mignonne,
Ouvert et feuilleté.
Le plus vieux reposait. Presque jamais personne
Ne venait le trouver pour causer avec lui;
On redoutait l ennui.
Mais les rares lecteurs qui parcouraient ses pages
Comprenaient sur le champ son efficacité;
Ils devenaient prudents et sages
Et trouvaient le secret de la félicité.
Ceux qui feuilletaient l autre acquéraient, au contraire,
Un esprit téméraire
Et confondaient souvent, dans leur fierté,
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Anthologie de la fable au Québec
L abus avec la liberté.
Sous son masque charmant, voyez-vous, le beau livre
Cachait certain poison
Qui doucement enivre
Et trouble la raison;
Mais, d une expérience sûre,
Le vieux bouquin
Pouvait guérir toute blessure
Faite par son voisin.
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Les personnes légères
Nous amusent parfois mais nous nuisent toujours,
Et les hommes sévères
Nous déplaisent souvent en nous portant secours.
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Anthologie de la fable au Québec
Le cygne
Dans la nappe d or d un fleuve paisible,
À l heure où s en va le bac du pêcheur,
Un cygne mirait, fier de sa blancheur,
En se balançant, son galbe flexible;
Puis autour de lui des cercles nouveaux,
Toujours s éloignant sur les claires eaux,
Traçaient tour à tour comme une auréole.
Un poisson jaloux, prenant la parole,
Aux autres poissons dit en le voyant :
 Souffrirons-nous donc dans notre domaine
Ce fier étranger au col ondoyant?
Son vol l apporta que son vol l emmène;
Il est un oiseau, non pas un poisson.
 Qu il s en aille loin! dit, à l unisson,
Le choeur menaçant des poissons stupides,
Et tous contre lui s élancent alors.
Le cygne ouvre, ému, ses ailes rapides
Et vole en chantant jusque sur les bords.
 De quel droit viens-tu? dit un quadrupède,
Sortant irrité de l ombre des bois 
Je ne souffre pas qu on me dépossède;
Va-t-en dans les airs.
Le cygne, aux abois,
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Anthologie de la fable au Québec
Nagea dans l air pur et dans la lumière,
Modulant encore un soupir divin.
Alors tout à coup, la tête première,
D un nuage noir fondit l aigle vain :
 Descends, lui dit-il, tu n es pas des nôtres!
Sur le sol haï souvent tu te vautres
Comme l animal qui ne vole pas;
Comme un vil poisson tu nages, toi cygne,
Et tu prends dans l eau tes joyeux ébats.
Descends, ou, vois-tu, j appelle d un signe,
Pour te foudroyer, mes sujets de l air.
Le cygne s enfuit au fond du ciel clair.
Depuis ce temps-là dans la solitude
Le suave oiseau se cache avec soin;
Il soupire seul, plein d inquiétude,
Et le moindre bruit le fait fuir au loin.
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Parmi nous, hélas! souvent le génie
A même destin que le cygne doux;
Il sème, en passant, des flots d harmonie;
On le méconnait, et de vils jaloux
Le poursuivent loin de leur sale bave.
Le génie errant, nulle part souffert,
Qui jette en son vol un hymne suave,
Le génie errant cherche le désert.
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Anthologie de la fable au Québec
Les deux chevaux
 Je te plains, mon ami, mais je ne puis rien faire
Pour adoucir ton sort.
Souffre avec patience. À chacun son affaire.
Puis te voici, du reste, au port.
Cette parole fière et bien peu charitable
Était dite, un bon jour, dans le fond d une étable
Et d un air joyeux,
Par un jeune cheval au poil lisse et soyeux,
À son compagnon d existence
Dont la misérable pitance
Ne pouvait, à coup sûr, faire des envieux.
Ce dernier était vieux; [ Pobierz caÅ‚ość w formacie PDF ]

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